« Ottawa dévoile une ambitieuse initiative pour réduire la pollution plastique dans la vente au détail d’épicerie. Ainsi, il faut un meilleur équilibre entre responsabilité environnementale et salubrité alimentaire. »
Le gouvernement du Canada a présenté dernièrement une initiative prospective visant à traiter la question de la pollution due aux emballages plastiques dans le secteur de la vente au détail d’épicerie. L’Avis de planification de la prévention de la pollution (P2) cible spécifiquement les emballages plastiques en contact direct avec les produits alimentaires. Bien que des mesures telles que l’interdiction des sacs en plastique et l’élimination des ustensiles en plastique aient été mises en place, ces actions ne font qu’effleurer la surface du défi plus large posé par notre dépendance aux plastiques. P2 représente la prochaine étape logique et souhaitable pour lutter contre ce qui est probablement le problème le plus significatif dans l’industrie alimentaire : l’emballage alimentaire. Cependant, de tels changements ne viendront pas sans d’importants défis.
L’utilisation de matériaux plastiques à des fins d’emballage alimentaire a atteint une quantité substantielle de 37,3 millions de tonnes par an, selon la FAO. La plupart de ces plastiques sont des articles à usage unique qui finissent souvent au dépotoir. Dans le cadre du P2, les détaillants d’épicerie canadiens seraient tenus de formuler et de mettre en œuvre des plans complets de prévention de la pollution avec pour objectif principal la réduction, la réutilisation et la refonte des emballages plastiques dans la distribution alimentaire. Basé sur des documents d’Environnement et Changement climatique Canada, le P2 est conçu de manière stratégique pour éliminer les emballages plastiques superflus ou problématiques et introduire des systèmes fiables basés sur la réutilisation et le remplissage pour remplacer les plastiques à usage unique. L’accent est mis sur l’assurance de la recyclabilité, la réutilisabilité ou la compostabilité de tout emballage plastique associé à ces produits.
En principe, l’objectif de réduire l’utilisation du plastique est louable. Cependant, il est important de reconnaître que les plastiques sont largement utilisés en raison de leur efficacité en matière de salubrité et de leur coût moindre par rapport aux alternatives existantes. Les plastiques jouent un rôle vital dans la préservation de la fraîcheur des aliments et de leur attrait esthétique pendant des périodes prolongées. Compte tenu de la forte culture de sécurité alimentaire au Canada, les consommateurs peuvent hésiter à acheter des produits non emballés ou insuffisamment emballés, les considérant comme risqués.
Le gaspillage alimentaire est une autre préoccupation, car les plastiques permettent le transport sûr des produits sur de longues distances sans compromettre leur fraîcheur ou leur qualité. Les produits de moindre qualité sont moins susceptibles d’être achetés par les consommateurs, et les détaillants en ont bien conscience. Malgré la popularité des plastiques parmi les Canadiens, le soutien à leur utilisation pourrait diminuer lors d’événements imprévus tels qu’une pandémie. Des changements d’opinion publique ont été observés par le passé, de nombreuses personnes considérant les plastiques comme une protection contre les bactéries et les virus. La contamination croisée et la gestion des allergènes sont également des préoccupations à prendre en compte.
Des préoccupations liées à la criminalité émergent, car les plastiques protègent les fruits et les légumes contre d’éventuelles manipulations, comme cela a été le cas lors d’un incident survenu dans un supermarché australien en 2018.
Les efforts visant à éliminer les plastiques sont essentiels, mais la prudence est de mise. L’industrie et les consommateurs devront adapter leurs attentes, en acceptant certains compromis en termes de commodité et de prix. Cependant, selon un récent sondage effectué par notre Laboratoire, moins de 15 % des Canadiens sont prêts à payer plus cher pour des aliments avec des emballages plus respectueux de l’environnement malgré les prix plus élevés ces temps-ci. Ceci représente un défi pour l’industrie qui devra innover sans se fier à la volonté des consommateurs de payer plus cher pour leurs aliments.
Les détaillants d’épicerie et les parties prenantes ont jusqu’au 30 août pour contribuer leurs précieuses observations et inquiétudes concernant le document de consultation décrivant les progrès à venir dans le cadre du P2. Nous espérons que ce processus apportera des résultats fructueux pour toutes les parties prenantes impliquées