Les Français sont de plus en plus méfiants envers les grands acteurs du secteur alimentaire et cette défiance atteint même des filières comme le bio, selon une étude présentée jeudi 6 février. Les exigences éthiques ont changé la perception des consommateurs de la qualité d’un produit.
Manger plus sainement tout en respectant à la fois l’environnement et les agriculteurs ? Jamais sans doute l’industrie agroalimentaire et la grande distribution n’ont autant communiqué sur leurs engagements en la matière. Mais, comme l’a expliqué le 6 février Nathalie Damery, présidente et cofondatrice de l’Observatoire société et consommation (Obsoco), rassurer les consommateurs est devenu pour ces acteurs une tâche de plus en plus compliquée.
« Le climat de défiance des Français est généralisé et le secteur de l’alimentation est loin d’être épargné », a-t-elle expliqué en présentant les principaux résultats de l’Observatoire du rapport à la qualité et aux éthiques dans l’alimentaire. Cette enquête (1) vise à mieux comprendre les attentes des consommateurs vis-à-vis de leur nourriture, comment ils jugent de la qualité des produits et comment ils adaptent leur alimentation en fonction de leur éthique personnelle.
68 % des Français inquiets des effets sur leur santé
« Notre enquête montre que 79 % des Français se disent attentifs aux effets de ce qu’ils mangent sur leur santé et que 68 % sont inquiets des effets possibles de leur alimentation sur leur santé, indique Nathalie Damery. Or, vu le manque de confiance qu’ils accordent aux principaux acteurs de l’offre alimentaire, les rassurer devient un enjeu de plus en plus ardu pour les marques et la grande distribution. Presque creuser un puits sans fond, un travail sans fin. »
Cela peut surprendre, mais cette défiance n’épargne pas les magasins bios. Seules 59 % des personnes interrogées disent pouvoir faire « plutôt » ou « tout à fait » confiance à ces boutiques, soit une dégradation de 4 points par rapport à 2016. « On peut penser qu’avec une offre de plus en plus importante en matière de bio de la grande distribution, la relative mauvaise image de cette dernière a contaminé celle de l’agriculture biologique », dit Nathalie Damery.
Les petits commerçants suscitent plus de confiance
La dégradation de la confiance atteint 5 points en ce qui concerne les grandes marques alimentaires à seulement 35 %. Quant aux enseignes de grande distribution, 37 % des consommateurs disent faire plutôt ou tout à fait confiance (– 1 point par rapport à 2016). Au contraire, les petits commerçants gagnent 3 points de confiance à 62 %. On remarque aussi que même avec 2 points de moins, les petits producteurs sont ceux à qui les consommateurs disent faire le plus confiance, à 86 %.
Face à ces interrogations, les consommateurs veulent de plus en plus contrôler l’information alimentaire. Ils sont 36 % à utiliser plus ou moins régulièrement les applications du type Yuka pour évaluer la qualité des produits.
La montée de la prise de conscience environnementale et des exigences de responsabilité sociale ont aussi modifié la manière dont les consommateurs définissent la qualité d’un produit. Le goût est de plus en plus concurrencé par d’autres critères, notamment pour les produits « bruts ». 30 % des consommateurs citent ainsi « le goût » comme premier critère pour la viande, soit 17 points de moins par rapport à 2016. Mais ils sont aussi 30 % à mettre en premier lieu le fait qu’elle soit issue d’une « production respectueuse » (+ 8 points).
(1) Enquête de l’Obsoco avec Ferrero, GS1 France et Sodebo, réalisée en ligne du 5 novembre au 5 décembre sur le panel de Respondi, auprès d’un échantillon de 4 000 personnes représentatif de la population de France métropolitaine âgée de 18 à 70 ans.
Lien de l’article : https://www.la-croix.com/Economie/France/Alimentation-grande-defiance-consommateurs-2020-02-07-1201076868