Manger gras fait grossir. N’est-ce pas? Et bien ce n’est pas si simple. Cette idée est bien ancrée dans notre tête, à tel point qu’on a associé le gras à l’ennemi numéro un, des régimes comme de la santé.
Pourtant, de nombreux éléments « gras » qu’on trouve dans certaines huiles, poissons, noix, non seulement sont bons pour la santé mais en plus ne font pas forcément grossir. Mais pourquoi pense-t-on toujours que pour être en bonne santé, ou pour maigrir, il faut éradiquer le gras de son alimentation?
Tout a commencé dans les années 80-90 lorsque les autorités de santé américaines, suivant l’avis globalement partagé des scientifiques sur la question, invitaient à limiter le gras dans son alimentation pour éviter d’avoir des problèmes cardio-vasculaires et de perdre du poids.
Problème, nous n’avons évidemment pas remplacé le gras par plus de fruits et de légumes… mais par des produits sucrés. « Nous avons collectivement fait fausse route en éradiquant le gras de notre alimentation. Il a bien fallu le remplacer par autre chose. C’est ainsi que le sucre s’est invité en grande quantité dans les produits du commerce, pour certains de ses atouts très prisés de l’industrie alimentaire: comme les graisses, il rallonge la durée de conservation des aliments et c’est un exhausteur de goût hors pair », écrivent Charlotte Debeugny, nutritionniste et Catherine Moreau, auteure culinaire, dans « Je mange du bons gras et ça me fait du bien! »
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» Santé Canada propose d’interdire un type de gras trans industrielEn fait, pour comprendre comment le sucre s’est imposé à la place du gras, il faut même remonter au début des années 60, quand la communauté scientifique a commencé à s’interroger sur ce qui était le plus mauvais pour notre cœur.
Comme le révélait récemment le New York Times, le lobby du sucre a alors eu une idée fantastique… payer trois scientifiques d’Harvard quelque 6500 dollars (50.000 dollars actuels) pour publier une méta-étude sur le sujet du sucre et du gras. Sauf que le lobby a une consigne: il faudra que le résultat accuse le gras et disculpe le sucre. Et pour en être certain, John Hickson, l’un des dirigeants de cette organisation, a choisi les articles que les scientifiques allaient inclure dans leur analyse. L’étude, publiée en 1967 dans une revue scientifique, fit grand bruit, accusant comme prévu les acides gras saturés et non le sucre. C’est en partie ce qui a influencé les autorités sanitaires.
Tous les « gras » ne sont pas mauvais
Aujourd’hui, de plus en plus d’études et de spécialistes le disent: le gras n’est pas notre ennemi, il faut simplement apprendre à distinguer les bons des mauvais gras. « Il existe différentes sortes de graisses, des bonnes et des mauvaises. Pour le sucre, ces distinctions ne sont pas fondées car, à peu de chose près, toutes les formes de sucre ont un effet négatif sur notre organisme », écrit le médecin nutritionniste Mark Hyman, auteur du best-seller « Mangez gras, maigrissez« . Le sucre reste du sucre, qu’il s’agisse de sucre raffiné, de sirop d’érable, de fructose ou de maïs, de nectar d’agave, de miel ou autre », poursuit-il.
Pour apprendre à bien manger gras, il faut distinguer les différents types de lipides, les graisses saturées, des graisses insaturées ou encore des acides gras trans.
Les graisses saturées, que l’on retrouve dans les produits laitiers, les œufs ou la viande rouge, s’ils ont mauvaise presse, doivent pourtant faire partie d’un régime équilibré. « Ce qui égare beaucoup de gens, même chez les scientifiques, c’est de croire que les acides gras saturés contenus dans les aliments sont ceux que l’on retrouve dans le sang (le cholestérol, NDLR) », explique Mark Hyman. « Ce qui n’est pas du tout le cas. En réalité, ce sont les glucides et les sucres, avec l’excès de protéines, qui stimulent la production, par le foie, des acides gras saturés présents dans le sang. » Dans son livre, il explique que ces acides gras sont en fait cruciaux pour l’organisme: certains permettent de renforcer le système immunitaire, d’autres jouent un rôle dans le fonctionnement du système nerveux, d’autres encore contiennent des vitamines indispensables comme les vitamines A, D et K.
« Tant que vous restez dans la modération, il n’y a pas de raison de supprimer le fromage, le beurre ou la crème fraîche. Les graisses saturées font partie d’un régime alimentaire équilibré », encouragent Charlotte Debeugny et Catherine Moreau.
Les graisses insaturées non plus ne sont pas nos ennemis, au contraire. Il s’agit du gras que l’on trouve dans l’huile d’olive, l’avocat, les poissons gras ou encore les fruits à coque. Oméga 7 et 9 dans l’huile d’olive ou l’avocat, oméga 3 dans le saumon, les sardines ou le tofu, oméga 6 dans les huiles végétales… Ce sont des « acides gras essentiels: notre corps en a besoin impérativement et seule notre alimentation peut nous les fournir », écrivent-elles. Attention toutefois à ne pas abuser d’oméga 3 et 6, dont la consommation trop élevée peut accroître « le risque d’inflammation donc de maladies chroniques ».
Attention aux acides gras trans
En revanche, vous pouvez oublier les graisses trans, « toutes dangereuses sauf un type précis », affirme Mark Hyman. Ce gras à bannir de votre alimentation, c’est celui que l’on trouve dans « les plats préparés, les margarines, les aliments frits et les produits transformés ». Dans les fast food, les biscuits, les chips… On trouve des acides gras trans.
Ces graisses, mis à part celles qui composent aussi la viande de bœuf et les laitages, « augmentent les concentrations des petites particules de LDL (le mauvais cholestérol, NDLR) tout en réduisant celles du HDL, le bon cholestérol. Il peut en découler une inflammation chronique, des problèmes cardiaques, du diabète, avec un risque accru de mort brutale. Le risque de cancer est aussi augmenté », détaille le spécialiste.
Ces dernières années, plusieurs études sont venues confirmer que les matières grasses ne devaient pas être diabolisées. L’Anses recommande actuellement un apport en lipides de 35 à 40%. Comme l’explique Elle, cela signifie, pour une femme consommant 2000 calories par jour, ayant une activité physique une ou deux fois par semaine, à 75 à 90g de graisses par jour. Une moyenne permettant « d’assurer la couverture des besoins en acides gras essentiels et indispensables et prend en compte la prévention des pathologies ».
Ainsi, qu’il s’agisse de perdre du poids ou de se maintenir en bonne santé, rien ne sert de fuir le gras, sauf celui les acides gras trans. Comme toujours, pour le reste, tout est une question de juste milieu.
Le HuffPost | Par Marine Le Breton Publication: