Par Sylvain Charlebois
Le cumul d’incidents notoires portant atteinte au bien-être animal diffusés par les médias sème l’indignation chez les consommateurs envers l’industrialisation de l’agriculture, et ce phénomène ne disparaîtra pas de sitôt.
Le traitement éthique animal à la ferme revient souvent hanter le secteur agroalimentaire, et pas seulement la production primaire. C’est l’ensemble de la chaîne qui est affecté. De temps en temps, une vidéo, prétendument filmée à l’intérieur d’une ferme par un groupe particulier, dérange des citoyens qui ont certes de toutes autres attentes. Ces gestes sont grossiers et bien sûr condamnables par la loi. Mais il y a aussi des pratiques reconnues qui existent depuis fort longtemps et qui sont maintenant montrées du doigt plus que jamais, notamment la fabrication du foie gras et les poules pondeuses en cage. Même le transport animal fait l’objet de critiques ces derniers temps. Ces représentations contrastent avec les images bucoliques que plusieurs ont de l’agriculture d’antan. Bref, le cumul de cas sème l’indignation chez les consommateurs envers l’industrialisation de l’agriculture, et ce phénomène ne disparaîtra pas de sitôt.
Tour à tour, de nombreuses filières ont déjà arboré des signes d’inadvertance. Le porc, les vaches laitières, les poules pondeuses, le fameux foie gras québécois, tous ont déjà fait les manchettes. Puisque plus de 75 % de la population n’a jamais mis les pieds dans une ferme et y a encore moins vécu, ces images choquent et surprennent. Malgré la carence d’expérience en agriculture, les citadins qui possèdent des animaux de compagnie y sont sensibles jusqu’à un certain point. D’ailleurs, il est estimé qu’au moins 40 % des familles québécoises possèdent au moins un animal de compagnie. Pour celles-ci, c’est la seule relation qu’elles ont avec un animal, un lien affectif qui se transpose facilement envers les animaux de ferme. Par une simple juxtaposition sentimentale, ces personnes s’attendent tout simplement à autre chose de la part des agriculteurs. Tout compte fait, c’est la moralité des pratiques agricoles et non le statut juridique du bien-être animal qui prend tranquillement le dessus dans la conscience des consommateurs. Ce virage continuera à changer les habitudes de ces derniers.
L’Europe en avance, le Québec aussi
L’Europe a certainement pris de l’avance sur l’Amérique du Nord à cet égard. Par exemple, plusieurs pays dont la Suède, l’Italie, l’Allemagne et les Pays-Bas ont diminué leur élevage en batterie de poules pondeuses, adoptant ainsi un système de production alternatif. Bien que la loi européenne soit plus progressiste en matière de bien-être animal, les consommateurs en paient le prix. Une dizaine d’oeufs coûte en moyenne de 4 à 6 $ maintenant, et il est très difficile d’en trouver en magasin durant le week-end. C’est pratiquement deux fois plus cher qu’au Québec. Par contre, pour les défenseurs du bien-être animal en Europe, le prix de détail reflète le coût réel de production, rien de moins.